L’INDUSTRIE NAVALE EN SITUATION PRECAIRE À 3 ANS ATTEND DES MESURES FORTES DU GOUVERNEMENT
DEC. 2022
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Le GICAN représente l’industrie navale française, un secteur fort de 650 entreprises, 13 milliards de chiffre d’affaires en 2021, plus de 50 000 emplois directs. Chantiers navals, intégrateurs, systémiers, équipementiers, sous-traitants, bureaux d’études, ils conçoivent, construisent et maintiennent des navires civils et militaires, des sous-marins, des drones maritimes sous-marins et de surface, et utilisent leur savoir-faire pour proposer des solutions dans le domaine des énergies maritimes renouvelables (stations électriques des champs éoliens, hydroliennes, etc.). Ils contribuent à la souveraineté de la France en développant les solutions permettant de surveiller, défendre nos zones territoriales et projeter les forces sur les zones de crise, mais aussi tous les navires qui concourent au bon fonctionnement de la logistique maritime, ou les solutions pour développer les approvisionnements en énergie.
Industrie du temps long, l’industrie navale est en situation précaire
Bien que les chiffres d’affaires montrent une certaine croissance ces dernières années et une bonne résistance à la COVID-19, il faut se rendre à l’évidence que la situation est précaire : industrie du temps long, l’industrie navale livre en ce moment des navires qu’elle a reçus en commande il y a plusieurs années. Mais force est de constater que les carnets de commande des chantiers français, mais plus généralement des Européens sont, en baisse absolue, et relative en comparaison avec les pays asiatiques (Chine, Corée du Sud) ainsi que la Turquie.
Une baisse des carnets de commande en Europe
Avec la crise du COVID-19, l’Europe est la plus touchée par la baisse des commandes
La baisse de l’activité aura un impact sur l’emploi et générera des difficultés de recrutement
La baisse de l’activité d’ici trois ans aura un impact fort sur l’emploi, avec des difficultés ensuite pour embaucher des nouveaux collaborateurs en cas de reprise pour deux raisons principales :
- la perte de confiance dans un secteur qui est en décroissance (image encore portée par cette industrie suite à la crise des années 1980) ;
- une indisponibilité des ressources humaines, plusieurs secteurs (aéronautique, nucléaire) nécessitant des compétences du même acabit.
Pourquoi l’industrie navale française est-elle dans l’incapacité de développer son carnet de commande ?
Le manque de productivité de l’industrie navale française : Au-delà des problématiques communes à de nombreuses industries françaises (nécessité de baisse des impôts de production bien plus élevée que les autres pays européens), l’industrie navale a plusieurs autres facteurs qui jouent en sa défaveur et créent un déficit de productivité :
Plusieurs pays sont reconnus pour soutenir et subventionner leur industrie naval, en contravention absolue des accords de l’ MC. L’ urope reste ainsi le seul continent à appliquer les règles de droit international. Néanmoins, aucune mesure de rétorsion n’est prise face à cette distorsion de concurrence. Cela impacte d’autant plus les chantiers européens, car les navires ne sont pas considérés comme des biens importés, par conséquent ne sont pas soumis aux taxes d’importation, et ainsi ne bénéficient pas des premiers outils de défense de l’OMC.
L’acier et l’aluminium européens sont plus chers que ceux qu’on trouve sur les autres continents. Or les matières premières peuvent avoir un impact important sur le prix d’un navire (jusqu’à 60% pour les petits navires). Les problématiques d’approvisionnement actuelles ne sont pas pour simplifier la vie des chantiers, qui doivent faire face à des pénalités de retard. La création du mécanisme d’ajustement du carbone aux frontières (MACF) vient encore impacter le coût des matières premières des industriels importateurs, créant une différence de coût encore plus grande une fois le produit fini, en comparaison à un chantier asiatique. Le système aura aussi tendance à favoriser l’importation de tronçons et de coques nues à proximité des frontières européennes (Turquie, Maroc, etc.) réduisant la valeur ajoutée produite en France et en Europe.
L’absence de ressources humaines sur certains métiers obligent les industriels à recourir au travail détaché. Contrairement à ce qui peut être communément expliqué, ce recours a un coût plus important pour l’entreprise.
Une problématique de compétitivité : les armateurs européens préfèrent acheter leurs navires en Asie plutôt qu’en Europe, favorisant l’émergence de géants industriels ultra-compétitifs, et ce d’autant plus qu’ils sont soutenus par leurs Etats.
Le risque de disparition des chantiers navals français n’est donc pas à exclure. Cela aurait un impact majeur sur l’ensemble de la supply chain et sur la souveraineté européenne. Page 3 sur 3
Les équipementiers exportent mais ils sont eux-mêmes soumis à des règles de local content dans de nombreux pays où ils travaillent, et où la valeur ajoutée n’est plus produite en France.
L’ État doit donc agir pour permettre à notre industrie d’être compétitive et forte à l’international.
Quelques instruments majeurs à mettre en place rapidement en France :
#POINT A
La reconnaissance de la concurrence déloyale et la mise en place de moyens pour lutter contre celle-ci.
#POINT B
L’amélioration de la compétitivité française avec la baisse des impôts de production, mais aussi la simplification de l’utilisation du travail détaché et la compréhension, par la Direction générale du travail et de ses employés, des enjeux, en contrepartie d’engagements de la filière sur l’accompagnement aux formations en France sur les métiers en tension.
#POINT C
Le soutien à l’innovation et à la décarbonation, seul moyen pour que la France se positionne comme un leader sur le transport maritime décarboné : simplification de l’accès aux fonds France 2030 sur la R&D, l’innovation et l’industrialisation sur les enjeux de notre secteur auprès des opérateurs de l’Etat (Ademe, bpifrance…). Non seulement il faut soutenir l’innovation mais également encourager son déploiement et son industrialisation.
#POINT D
La création d’un fonds de soutien pour le verdissement des navires et les premières commerciales de nouvelles technologies, dont les ressources sont attribuées aux chantiers et aux équipementiers. Il importe rapidement d’alléger le surcoût lié à l’installation des équipements décarbonés. Tout comme l’automobile et l’aéronautique, le naval a besoin de son fonds de relance et de verdissement dédié.